15/09/2011
EN TRAIN
« COACHING » ET DÉCADENCE.
Plongée dans « Les orpailleurs »*, je crois que je sais-c’est-qui l’assassin. Il verbouse et tout le wagon en est éclaboussé. Pas le meurtrier mais le type qui est séparé de mon voisin par le couloir central. Pascal, il s’appelle : c’est écrit sur son ticheurte avec le nom de son employeur. Il doit avoir la trentaine et une jolie petite mallette colorée avec aussi le nom de son employeur. Il serre fermement son téléphone portable. Il sort du « Festival international de la Plaisance » et tient à ce que cela se sache. Pascal est commercial et vend à temps plein, (il fut vraisemblablement bien « coaché »). Son voisin, assez sinistre, apprécie l’aubaine de la verve, un peu moins les autres auditeurs forcés. D’ailleurs, de cinq rangs éloignée, une dame vient lui demander si possible, de baisser un peu le ton. Pascal s’exécute en rosissant de déplaisir et maugrée quelque peu.
Chance, son téléphone sonne et peut-on téléphoner à voix basse ? Le bourdonnement satisfait et enthousiaste redémarre. À peine l'échange terminé qu’un nouvel appel : une cliente mécontente (excusez-moi d’avoir capté la conversation), me fait perdre la trace de l’assassin.
« Écoutez, Madame », dit Pascal, « je vais vérifier, mais je ne suis pas au bureau. »
Je bondis sur l’occasion :
« En effet, vous n’êtes pas au bureau, vous êtes dans le train. »
Mon voisin, exaspéré :
« Vous ne pourriez pas aller téléphoner sur la plateforme ? »
Alors, Pascal, d’un geste large, nous montre tous les petits portables dessinés au-dessus de chaque paire de sièges :
« Vous voyez bien qu’on peut téléphoner », dit-il.
« Mais ils ont les yeux fermés », dis-je, « justement pour indiquer qu’il faut éteindre son portable ».
« Imbécile ! » grogne mon voisin.
Pascal est hors de lui :
« À votre place et à votre âge, j’continuerai pas. Passqu’avec moi vous allez vous retrouver le cul nu ! Si vous n’êtes pas content, voyagez en première ! ».
(Non, je ne lui dirai pas qu’en première existent hélas, les mêmes Pascal(s) mais ... qui ont réussi). Fin du pugilat.
D’ailleurs, providentiellement, c’est là qu’il descend, Pascal le commercial.
*Thierry Jonquet, Romans noirs, Les Oorpailleurs, Folio policier.
© Anna Livia.
17:55 Publié dans Blog | Lien permanent
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