VIE DOMESTIQUE

« Ast ayant donc décrit cette ellipse, put regarder enfin avec satisfaction le beau balayage qu’il venait de mener à bien, méthodiquement, sans hâte mais avec sûreté, tel un laboureur. Il ouvrit donc la porte et sa joie s’augmenta de la constatation qu’il fit de la justesse de son coup d’œil : rien ne fut dispersé. Il revint avec la pelle et le seau. L’opération se poursuivit sans difficultés notables : la seule étant la petite marge de poussière qui ne se laisse jamais entraîner dans la pelle par le balai. On réussit à l’amincir sans jamais la faire disparaître entièrement ; lorsque l’on constate que chercher à la diminuer encore plus serait se fixer une tâche illusoire et dénuée de toute portée pratique, le plus simple est de disperser le résidu aux quatre coins de la pièce.
Ce que fit Ast.  »
Raymond Queneau, Les Enfants du Limon, roman, nrf, Gallimard, 1977, pp. 194-195.

Parvenue à l'âge où l'on se fait comptable de son passé,
elle se demandait d'où venait l'expression : "J'ai X balais",
elle qui en avait possédé un nombre très modéré au cours de sa vie domestique.

Photo Anna Livia, 2009.

 

 

VIE DOMESTIQUE

 

Parvenue à l'âge où l'on se fait comptable de son passé,
elle se demandait combien de serpillières (aujourd'hui "toiles à laver"),
grises et misérables dès le premier usage, avaient accompagné sa vie domestique.
Nombreuses, sans doute. Mal séchée, une serpillière ne manquait jamais de lui
rappeler l'ineffable odeur du préau-réfectoire, quand elle avait été passée
immédiatement après le cours de gym et juste avant le déjeuner.

Photo Anna Livia, 2009.

VIE DOMESTIQUE

Parvenue à l'âge où l'on se fait comptable de son passé,

elle savait qu'elle conservait depuis longtemps le même balai-brosse...

Peut-être la première brosse était-elle en chiendent ?

Photo Anna Livia, 2009.